Jean-Christophe Maillot reçoit le « Life Time Achievement Award » du Prix de Lausanne

Jean-Christophe Maillot reçoit le « Life Time Achievement Award » du Prix de Lausanne
7 février 2018
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Jean-Christophe Maillot reçoit le « Life Time Achievement Award » dans le cadre la 46ème édition du Prix de Lausanne.

Le chorégraphe-directeur est récompensé pour ses « 30 ans de dévouement au monde de la danse » ainsi que pour son travail à la tête des Ballets de Monte-Carlo. Il sera le second chorégraphe à obtenir cette reconnaissance après John Neumeier l’an dernier.

Jean-Christophe Maillot a été lauréat du concours en 1977 en qualité de danseur, il a par la suite été membre ou Président du jury à plusieurs reprises…

La directrice artistique du Prix de Lausanne, Madame Shelly Power, a ténu à remercier chaleureusement Jean-Christophe Maillot à cette occasion.

A cinquante-sept ans, le chorégraphe et directeur des Ballets de Monte-Carlo vient de recevoir le deuxième Life Time Achievement Award du Prix de Lausanne, qui lui sera remis le 3 février au Théâtre Beaulieu au cours de la soirée de clôture. Photo_Prix_lausanne_18

Entretien.

Surprise, émotion et connexions

Je ne m’attendais pas du tout à recevoir ce prix. Heureusement que je n’ai pas encore soixante ans, sinon ça sentirait trop le sapin et ça m’aurait fait peur (rires) ! Plus sérieusement, j’ai été particulièrement touché que cette distinction me soit décernée par le Prix de Lausanne. C’est une institution qui compte énormément pour moi. Si je n’avais pas reçu en 1977 le Prix et la bourse qui allait avec, je n’aurais sans doute pas pu continuer mes études dans l’école de Rosella Hightower à Cannes, où j’étais élève. Un lien indissoluble me relie au trio fondateur qui a créé le Prix, Philippe Braunschweig, son épouse Elvire et Rosella. Ils ont été essentiels pour ma carrière, et nous ne nous sommes jamais perdus de vue. J’ai participé au Prix quatre fois comme membre du jury (en 1986, 88, 89 et 92) et quatre fois comme président (en 1994, 97, 2000 et 2012), ce qui m’a permis de suivre depuis trois décennies toute la vie internationale du monde de la danse. Si je songe, en outre, que ce Prix a aussi récompensé des gens comme Diana Vishneva, Laëtitia Pujol, Benjamin Millepied ou Bernice Coppieters, auxquels je suis très lié, j’en conclus qu’il n’y a pas de hasard !

John Neumeier

Partager ce prix avec John Neumeier, qui l’a reçu le premier l’an dernier, est pour moi une autre forme de filiation. Parce que John s’entendait très bien lui aussi avec Elvire et Philippe, et parce qu’il est le seul chorégraphe pour qui j’ai travaillé en tant que danseur, dans son ballet de Stuttgart entre 1978 et 1983. Son influence a marqué de manière indélébile tout ce que je fais et ce que je vis, qu’il s’agisse de la création du Monaco Dance Forum, de l’intégration de l’Académie Princesse Grâce dans la même structure que les Ballets de Monte-Carlo, de l’invitation régulière d’autres chorégraphes dans ma programmation… Il y a dans tout cela une trace indiscutable de son enseignement et de sa pratique, et j’en suis très heureux.Jean-Christophe_Maillot_-_photo_Alice_Blangero_2

Bilan de carrière

Recevoir ce prix vous oblige à faire un bilan professionnel, ce qui est à la fois terrible et merveilleux. J’ai commencé à travailler pour les Ballets de Monte-Carlo en 1987 et j’en suis devenu le directeur en 1993. En trente ans, j’ai fait travailler huit cents danseurs – en considérant uniquement ceux engagés sous contrat pour au moins un an – et soixante et un chorégraphes. J’ai permis aussi la naissance de cent quatre créations, dont quarante personnelles. J’ai eu la chance extraordinaire de tomber sur un lieu atypique, dans un pays lui-même atypique. Être en même temps chorégraphe et administrateur financier d’une structure, être responsable d’une compagnie et inviter d’autres chorégraphes, créer les Nijinski : à l’époque, ça n’était pas possible ailleurs, notamment à Tours où j’avais dirigé entre 1983 et 1987 le Ballet du Grand Théâtre. Lorsque je regarde tout cela, je me dis que nous – car c’est une aventure collective – avons fait du bon travail. Aujourd’hui, la compagnie va bien, elle tourne plus que jamais et personnellement, je suis heureux d’être toujours en vie artistiquement. Mais attention, ce n’est pas une conclusion, et surtout pas la fin !!!

L’évènement le plus marquant

En 1981, mon accident du genou a fait basculer ma vie. J’ai appris qu’une carrière ne tenait à rien, qu’il existe des éléments sur lesquels nous n’avons aucun contrôle. Cet événement qui aurait dû avoir des conséquences tragiques a été ma chance : il m’a permis de faire autre chose, de danser par procuration en devenant chorégraphe. Aujourd’hui, la chorégraphie est ma passion. Je porte à tous les danseurs un profond attachement et à travers eux, je raconte en fait comment j’aurais aimé danser. Je sais maintenant que je n’étais pas vraiment un danseur, sinon, d’une façon ou d’une autre j’aurais fini par réparer et guérir cette blessure au genou. Elle m’a permis de changer de voie, de gérer une compagnie et de créer des ballets.

Un regret…

Lorsque Bernice Coppieters avait vingt-quatre ans, je lui ai dit que je créerais un jour pour elle une Mégère Apprivoisée. J’ai effectivement créé ce ballet en 2014, pour le ballet du Bolchoï, mais trop tard : c’était l’année où Bernice avait décidé d’arrêter de danser. Elle a été mon assistante sur cette pièce, a participé à sa création, a coaché la compagnie et a été formidable, ce qui a augmenté mes regrets, mais elle ne l’a pas dansée…

Des projets pour le futur
Chaque année est une vie. Surtout dans ce Ballet, qui n’est pas une compagnie de répertoire, où nous n’avons pas de théâtre à alimenter et où chaque création est un événement. Pour moi qui suis incapable de me projeter plus de deux ans à l’avance, ce mode de fonctionnement convient parfaitement, il correspond à ma manière de vivre. J’ai de plus en plus envie de faire appel à des chorégraphes extérieurs, je trouve que les danseurs qui rejoignent les Ballets sont de plus en plus intéressants, et je ressens toujours le même émerveillement à les voir. J’en suis peut-être à ma trois millième répétition et je suis toujours emporté par leur vie, leur énergie et cet enthousiasme de la jeunesse. C’est ça l’essentiel !

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